Les humanités numériques sont-elles dans le monde industriel ?

Pierre BezierA lire les comptes-rendus des différentes journées sur les humanités numériques qui ont lieu ce printemps, je me demande s’il n’y a pas un lien de plus en plus fort entre humanités numériques et le monde industriel. En effet, le monde de l’industrie créé des outils mais surtout y réfléchit et les fait évoluer à la recherche d’une meilleure précision, d’une meilleure performance. Le besoin d’introduire, lors du déroulement d’un projet se réclamant des humanités numériques, une réflexion épistémologique, voir sociologique, me fait penser que le temps du « c’est de la technique, de l’informatique donc ce n’est pas de la science » est peut-être entrain de passer derrière nous. Les humanités numériques se peuplent de séminaires épistémologiques ouvrant une nouvelle dimension pour ce mouvement.  Paradoxalement, une partie d’entre elles pourrait être condamnées « à disparaitre ». Le volet le plus technique, l’adaptation d’outils à un besoin par exemple, pourrait être transformé par la mutation permanente des méthodes et par l’appropriation/démocratisation de savoir-faire dit « technique » par un grand nombre d’acteurs. Un peu comme pour les ouvriers de chez Renault quand l’automation introduite par Pierre Bézier s’est développée. Évolution naturelle ? Les humanités numériques sont elles simplement les sciences humaines et sociales dans un monde numérique ? Donc, nous sommes au moment ou la recherche en SHS se fait avec des outils numériques dans un monde « devenu » lui aussi numérique. Le monde industriel – je pense à l’aviation par exemple – créée ses outils, ses machines-outils, réfléchit sur ces outils, améliore sans cesse ses chaines de production : c’est à dire les liaisons entre les briques-outils qui les composent. Il reste des savoir-faire à relier en particulier sur l’édition-documentation-archivage, il reste des pratiques à changer : séparation données/outils de traitement (dans une perspective d’archivage des corpus de données) ou encore il reste à ré-introduire l’explicitation systématique des méthodes, choix effectués et ne plus parler vaguement par exemple autour de la notion de métadonnées. Ce « parallèle » que je me permet de faire entre humanités numériques et industrie est surtout là pour affirmer qu’elles sont avant tout l’utilisation de techniques dans un processus de recherche, en fait de l’ingénierie (documentaire en particulier), comme Got me le rappelait il y a quelques temps. Ainsi, il ne faudrait pas que soit exclu du mouvement des humanités numériques, des acteurs qui n’incorporeraient pas dans leurs projets cette dimension épistémologique.

Stéphane.

Les données numériques des SHS entrent dans le web de données

Avec l’ouverture d’isidore (réalisée par le très grand équipement Adonis du CNRS) les données numériques des sciences humaines et sociales entre dans le web de données et vont bientôt rejoindre le linking open data cloud diagram ou « Lod » maintenu par Richard Cyganiak (DERI, NUI Galway) and Anja Jentzsch (Freie Universität Berlin), en tous cas, je l’espère.

Isidore est une plateforme de recherche permettant la recherche d’information dans les données numériques des SHS, quelles soient sources pour faire de la recherche ou bien publications des résultats de la recherche. J’ai le plaisir de co-diriger ce projet avec Jean-Luc Minel dans le cadre de l’équipe du Adonis, le très grand équipement du Centre national de la recherche scientifique.

Je profite de ce petit billet « auto-promotionnel » pour remercier Gautier Poupeau (alias Got) sans qui ce projet n’aurait pas pu être conçu et réalisé ainsi que toute l’équipe du centre pour la communication scientifique directe (Laurent Capelli, Philippe Correia, Loic Comparet, Yannick Barborini et Daniel Charnay) qui participe à ce beau projet.

Isidore moissonne des métadonnées et des données selon les protocoles OAI-PMH, des signalements d’actualités via RSS et Atom, des données structurées selon RDFa et peut se connecter à des catalogues de bibliothèques SRU/SRW (z3950). Isidore enrichit ces données en les croisant, en les qualifiant avec des thésaurii, des référentiels, des listes d’auteurs et les ré-exposent selon les principes du linked data. Pour utiliser ces données, un site web a été créé : www.rechercheisidore.fr. Vous pouvez donc interroger les articles de Revues.org, Cairn, Persée, les ouvrages, textes, images de Gallica, HALSHS, MédiHAL avec un seul formulaire et avec des liens entre toutes ces données.

Dans isidore, les métadonnées sont transformées en RDF, ainsi les données des shs entrent dans le web de données.

Mais nous sommes en version béta, alors le travail continu.

Stéphane.